A propos du port de la blouse.
Parler du port de la blouse me
renvoie comme à chaque fois à des références Lacaniennes. Les infirmiers
qui m’ont appris mon métier parlaient de la symbolique du « signifiant »
et du « signifié ».
La blouse est l’étoffe de tissu que les enfants, les soignants mais aussi
d’autres professionnels portent pour exercer leur métier, leur art.
Le signifiant de l’étoffe représente la tenue de l’infirmière. Le signifié concerne les soins, tout
ce qui peut répondre aux besoins, aux demandes du malade et renvoie à
l’institution soignante. Ces notions de signification prennent sens
autant pour les malades, que les visiteurs mais aussi les soignants eux-mêmes.
Je n’ai jamais eu le blues de la blouse. Au début de ma carrière, il y a plus de 20 ans j’attachais mes services à une institution de soins où la pratique de la psychothérapie institutionnelle avait été son élan créateur. Chaque professionnel quelque qu’il soit est soignant s’il travaille dans l’institution. Elle-même est dite soignante. Nous soignons avec nous même. Le patient nous reconnaîtrait soignant pour nous même alors à quoi bon se distinguer par une vêture différente ? A cette époque je ne mettais la blouse que pour les soins techniques, toilettes ou prises de sang par exemple.
Plus tard, auprès d’enfants plus jamais de blouse. J’étais pourtant dans des hôpitaux dits psychiatriques…N’en étais-je pas soignant pour autant ?
Plus tard encore de retour en psychiatrie adulte publique, j’ai du mettre une
blouse et ne jamais la quitter sauf pour des actions de soins hors les murs.
Cette pratique était contingente des évolutions et des lois concernant
l’hygiène hospitalière avec la création
des CLINS[1]
et l’apparition de multiples groupes de réflexion sur l’hygiène… Il m’est
arrivé de courir après des patients fugueurs, sortis sans avis médical ou pour
la société médiatique : évadés… C’est alors qu’une traîne de blouses
blanches court vers l’extérieur et sort dans la rue comme cela… C’est là que
des regards étonnés se portaient sur nous. La blouse correspond donc aussi à un lieu : lieu
d’hospitalisation.
Quand nous travaillons dans des structures comme les CMP[2], nous ne portons pas de blouse. Chez le patient, en visite, de même…
La blouse est une protection dans la relation soignant-soigné. Elle mettrait à distance, la bonne distance du soigné ?
Outre le fait de respecter les règles d’hygiène et celles des services qui vous accueillent, je vous invite vous, jeunes professionnels à porter la blouse si elle est de mise et d’évoluer doucement afin de vous sentir à l’aise dans la relation avec le patient pour finir un jour par vous dire finalement c’est moi qui soigne avant tout et je n’ai plus besoin de cet insigne qu’est la blouse.
« Vous imaginez l'angoisse de la personne qui se
retrouve écartelée sur un lit d'hôpital psychiatrie par une marée d'uniformes
blancs, blancs jusqu'au bout des membres caoutchoutés, surmontés de masques
humains grimaçants. J'avoue avoir été impressionné à plusieurs reprises en arrivant
en renfort dans ce type d'ambiance. C'est sûr que pour quelqu'un de la
génération de X File, il y a de quoi se payer une méga angoisse dans le rôle de
l'inconnu de Rockwell sous le bistouri des chirurgiens militaires. ».
« Etre humain
doit gouverner nos actes mais aussi le soin de notre apparence. Ça n'empêche
pas les circonstances pour lesquelles blouses et gants sont nécessaires. Dans
ces cas là j'ai tendance à enfiler ce qui me tombe sous la main, veste de
pyjama, gilet… c'est un bon baromètre de la qualité du soin que d'observer la
façon dont les populations soignées et soignantes se mêlent
dans une unité de soins. »
«J'adore quand quelqu'un me fait une réflexion sur mon
absence d'hygiène à travailler sans blouse alors que lui est attablé au repas
avec celle qui lui a servi à faire les soins depuis deux jours. Et puis ne pas
porter la blouse cela oblige à se présenter, notre pratique est parlée, ce
n'est pas l'uniforme blanc qui sert de présentation ».