LE POLYHANDICAP
DEFINITION
Le polyhandicap équivaut à :
« Un handicap grave à expression
multiple, associant déficience motrice et mentale, sévère ou profonde,
entraînant une restriction extrême de l’autonomie, des possibilités de
perception, d’expression et de relation »
A cette définition correspondent de nombreuses
expressions cliniques, en fonction de la prédominance de l’atteinte motrice ou
mentale.
Les limites restent difficiles à déterminer
entre polyhandicap et infirmité motrice cérébrale d’une part, et, psychose
déficitaire d’autre part.
Ce polyhandicap peut-être aggravé de nombreux
autres troubles, nécessitant le recours à des techniques spécialisées pour le
suivi médical, l’apprentissage de la relation et de la communication, de
l’éveil sensori-moteur et intellectuel, afin de guider le patient vers une
autonomie optimale.
Cette dépendance quasi-totale de la personne
handicapée, nécessite une assistance technique et humaine permanente pour les
actes de la vie courante.
LES CAUSES
Elles sont multiples et variées. Les chiffres
avancés ne sont qu’approximatifs, dus aux avancées médicales et à la recherche.
Chiffres avancés dans les années 70
20 % à la génétique
20 % seraient accidentelles :
périnatales, thérapeutiques, traumatismes …
20 % imputées aux affections virales
Les 40 % restant sont encore inexpliquées.
30
ans plus tard,
les progrès de la prise en charge obstétricale d'une part, les méthodes de diagnostic
d'autre part, ont modifié ces chiffres qui se tiennent autour de :
30% de causes inconnues;
15% de
causes périnatales (dont un nombre très réduit de souffrances obstétricales par
rapport aux souffrances foetales ou grandes prématurités- dysmaturités);
5% de
causes postnatales (traumatismes, arrêts cardiaques);
50% de
causes prénatales (malformations, accidents vasculaires cérébraux prénataux,
embryopathies dont le CMV (cytomégolovirus) et le HIV (virus du SIDA). Mais il
s'agit ici de causes datées, pas forcément précisées.
De nombreuses études ont montré que les
progrès de la réanimation néonatale avaient fait baisser non seulement la
mortalité, mais aussi la proportion de séquelles handicapantes chez les
survivants.
Les progrès actuels portent sur les
causes génétiques (les cas familiaux ne sont pas exceptionnels), la poursuite
de la prévention des embryopathies, les pathologies fœtales, qui ne sont pas
toujours décelables ni accessibles au traitement. Il est probable que pour
beaucoup de cas, plusieurs causes se cumulent chez le même enfant.
La complexité même des
phénomènes qui règlent le développement du système nerveux central, expliquent
la difficulté de rattacher un cas donné de polyhandicap à une ou plusieurs
causes.
Les circonstances de la
naissance, permettent d’estimer que moins de 5 % des cas de polyhandicap
sont liés directement à une anoxie cérébrale au moment de l'accouchement (ce
qui représenterait moins de 1 enfant sur 10 000 naissances) pour les enfants
nés à terme avec un poids de naissance normal. La prévention périnatale s’avère
efficace dans des circonstances normales.
La prématurité et
les naissances multiples peuvent être à l'origine de quelques cas de
polyhandicap mais, cela reste rare; les difficultés qui se rencontrent chez les
anciens prématurés sont plutôt de l'ordre des difficultés d'apprentissage. En
revanche parmi les enfants polyhandicapés, on remarque une surreprésentation
des enfants nés avec un faible poids de naissance mais il s'agit
beaucoup plus d'enfants dysmatures ou ayant souffert d'anoxie cérébrale pendant
la gestation comme dans les cas de toxémies gravidiques. Certaines embryo-foeto-pathies
infectieuses (CMV, toxoplasmose) ou toxiques (tabac, alcool, poly-intoxication)
jouent également un rôle.
Les autres causes
prénatales conduisant à des lésions cérébrales graves sont encore mal connues.
Dans 40 % des cas, on ne connaît pas la cause du polyhandicap. Dans les autres
cas, il peut s'agir de maladies du développement liées à des aberrations
chromosomiques ou à une anomalie génétique ou de malformations
cérébrales qui peuvent avoir une double origine génétique et
environnementale, elle aussi mal connue.
Il existe malheureusement
des enfants polyhandicapés dont le premier développement, la naissance et la
gestation ont été normaux et qui sont victimes d'accidents aigus
(traumatisme crânien, noyade, encéphalite, état de mal convulsif grave).
Actuellement les établissements accueillant
des adultes sont confrontés au problème des séquelles graves de traumatismes
crâniens et de relations avec les familles qui ne sont pas toujours des parents
(au sens premier du terme) mais éventuellement des conjoints et des enfants.
LES PRINCIPALES DEFICIENCES ET INCAPACITES
● Les déficiences intellectuelles
• QI aux alentours de 0,5 entraîne chez le sujet :
• Des troubles ou absence de langage, ou un langage très rudimentaire.
• Des difficultés à se situer dans
le temps et l’espace, ainsi que des difficultés de mémorisation.
• Des troubles du comportement, à types des stéréotypies, auto-agressivité,
phénomènes de replis. Là se trouve la frontière entre le polyhandicap et
certaines psychoses déficitaires régressives (autisme)
●
Les troubles moteurs
Ils sont quasi constants.
• Infirmité Motrice d’Origine Cérébrale :
Chez certains sujets l’intelligence est
déficitaire, chez d’autres, le potentiel intellectuel est préservé, malgré les
difficultés d’expression.
Sur le plan neurologique, les troubles sont
les mêmes, à savoir, le défaut de régulation du tonus musculaire par les
centres nerveux (spasticité, rigidité, athétose…)
• Hypotonie massive :
Troubles du tonus musculaire, générant des
difficultés à maintenir une posture, perturbation du tonus des membres,
empêchant la coordination ou les mouvements volontaires.
• Désorganisation motrice :
Il existe souvent une méconnaissance du sens
de positionnement dans l’espace, des troubles de l’équilibre, une déambulation
automatique, ignorant les obstacles.
Les chutes sont fréquentes, les régressions
motrices graves, pas toujours définitives, mais rendant la fonction motrice du
sujet très aléatoire.
• Troubles moteurs secondaires :
Ils sont les conséquences du retentissement articulaire
de la spasticité, des positions vicieuses, ou de stéréotypies motrices et
source de douleurs.
Tous les efforts d’éducation motrice doivent
être entrepris dès le plus jeune âge et portent sur la prévention de ces
handicaps secondaires (installations, orthèses, coques moulées, corsets …
●
Les épilepsies
40 à 50 % des sujets en sont atteints.
Un cas sur 4 ou 5 sont difficiles à
équilibrer.
Elles sont caractérisées par une phase
tonique de quelques secondes (5 à10), répétitives, avec absence.
On parle parfois « d’épilepsie
chute » car la crise est imprévisible, se produit au
cours d’un déplacement et provoque des traumatismes de la face, des dents,
fractures…
Des troubles du comportement s’ensuivent. Le
sujet peut dormir plusieurs heures de suite, ou être agressif, ou hyperactif…
Il faut la différencier de la crise d’épilepsie dite de « Grand
mal »
Avec cyanose, chute de la langue en arrière, morsures,
convulsions cloniques particulièrement violentes, suivie d’une phase de comas
de plusieurs minutes.
●
Les troubles sensoriels.
Ils font partie de la panoplie des problèmes
aggravant le handicap.
De plus l’âge est un facteur aggravant.
• Atteinte auditive :
Son évaluation est compliquée car elle
requiert la compréhension du sujet pour être objective et l’appareillage pose
des problèmes d’ajustement et de tolérance.
Avec l’âge apparaissent l’intolérance au
bruit, la tendance à l’isolement (surdité naissante).
• Atteinte visuelle :
Les troubles de la vision sont très fréquents,
à type d’amétropie, cataracte congénitale ou acquise, malformations oculaires
et atteintes rétiniennes.
L’acuité visuelle s’altère sous forme
d’hallucinations ou fausses perceptions.
●
Les troubles associés
• Insuffisance respiratoire :
Le plus souvent chronique.
Due à l’hypotonie musculaire, les déformations
de la cage thoracique ou du diaphragme. La respiration se voit amputée d’une
partie du volume respiratoire, les échanges gazeux sont moins efficaces.
L’évacuation des sécrétions bronchiques
insuffisante ou non efficace. Le sujet ne sait (ou ne peut) pas expectorer.
• Troubles de la nutrition :
Dus, à une atteinte de la sphère
bucco-linguale, une difficulté à mastiquer (dentition inexistante ou
déficiente), trouble de la déglutition, déformation du conduit digestif,
hypersécrétion salivaire…ou incapacité à coordonner mastication et déglutition.
• Troubles de l’élimination :
Ils sont à type d’incontinence fécale et
urinaire.
Comme pour les autres troubles, sont en
causes, la mécanique humaine, mais également, l’immobilité, les thérapeutiques
médicamenteuses.
La constipation,
les fécalomes sont fréquents et les occlusions ne sont pas rares.
L’élimination urinaire est également
perturbée.
Les vessies peuvent être spastiques,
rendant l’évacuation vésicale incomplète.
On peut avoir recours au sondage itératif en
cas de vessie neurologique.
Les infections
urinaires sont récurrentes.
•La fragilité cutanée :
La personne polyhandicapée est
particulièrement fragile du point de vue cutané.
L’hygiène rigoureuse mais non excessive
préservera la qualité de leur défense naturelle.
Les mobilisations, retournements, levers
quotidiens, installations sont des moyens déterminants pour prévenir la
survenue d’escarres.
La malnutrition, de même qu’une
suralimentation est souvent remise en
question. Il sera nécessaire de surveiller le poids régulièrement et de
réadapter.
•Les troubles somatiques :
Le polyhandicapé est une personne fragile.
Le taux de mortalité est 10 fois plus élevé
que chez les sujets dits normaux à âge égal.
Un changement de milieu, de traitement, de
prise en charge, peuvent être très mal vécus, si la personne n’a pas été
préparée et provoquer une aggravation, voire le décès.
Le terme de polyhandicap est utilisé pour
désigner les lésions cérébrales congénitales les plus sévères et remplacer les
termes d’encéphalopathie ou d’arriéré profond.
Les états paucirelationnels de l’adulte,
secondaires à des lésions cérébrales acquises (traumatisme crânien, tumeurs
cérébrales, pathologies dégénératives du système nerveux central…) peuvent être
assimilés au polyhandicap.
Leur point commun est l’absence de
communication verbale ou codée, nécessitant une approche de la douleur par
hétéro-évaluation.
Les personnes polyhandicapées sont largement
exposées, en raison de la poly pathologie qu’elles présentent. Le plus souvent
de naissance.
Leurs moyens d’expression réduits et les
causes multiples, rendent le diagnostic de la douleur complexe et son
évaluation justifie, une connaissance approfondie de la personne
polyhandicapée.
Les familles comme les professionnels sont
concernées à juste titre par l’observation des comportements de leur malade,
afin d’apporter le plus d’éléments possible, pouvant concourir à la prise en
charge de la douleur chez ces personnes.
●
Les principales causes de douleur
• L’œsophagite
On estime que le reflux gastro-œsophagien est
présent chez 60 % des sujets. Il peut être à l’origine de d’anémie ou de
vomissements. Il provoque des douleurs à type de brûlure. Il n’est pas rare
d’observer chez le sujet atteint, des cris, agitation, pleurs, refus de
s’alimenter. Rapidement calmé par un
anti acide, ou un anti-reflux.
• Les lésions dentaires :
La dentition est très exposée aux caries.
En raison de la difficulté à exécuter ces
mêmes soins, la personne polyhandicapée ne peut pas forcément maintenir une
ouverture de bouche suffisante, de part sa morphologie, son niveau de
compréhension, sa sensibilité…
• Les lésions intra-buccales :
Morsures, brûlures, mucites… pas toujours
identifiées
• La constipation :
Fausse diarrhée, ballonnement abdominal,
aérophagie, provoquent des agitations pas toujours identifiées comme
révélateurs de douleur.
• Les troubles orthopédiques :
En particulier les luxations de la hanche, dont
la prévalence est estimée à 50 %.
• Les escarres
•Les douleurs iatrogènes :
Induites par les soins, trop souvent
sous-estimés ou déniés, car considérées comme inévitables.
●
Les éléments cliniques
• Le refus d’alimentation :
Doit faire rechercher une lésion
intra-buccale, dentaire, ou une cause de dysphagie (angine, otite, œsophagite).
• Les douleurs à la mobilisation :
Doivent faire penser à une douleur d’origine
ostéo-articulaire.
• Les douleurs à l’effleurement :
Ou au massage, évoquent des douleurs de
désafférentation.
• Les phénomènes spastiques :
Exagèrent souvent, ces mêmes phénomènes,
amplifiant la douleur.
Le cercle vicieux est rapidement
installé : D < S < D et peuvent conduire à la dégradation de l’état
général.
IL FAUT OUBLIER LES IDEES RECUES ENCORE TROP SOUVENT INSCRITES
DANS LES MENTALITES. Lésions cérébrales = Insensibilité Pas de communication = Evaluation impossible |
●
Evaluation de la douleur chez la personne polyhandicapée
Cette évaluation ne peut être qu’une
hétéro-évaluation, compte tenu des troubles cognitifs du patient.
L’échelle
San Salvadour
Elle a été développée par Combe et Collignon
et inspirée de la grille d’observation comportementale de Gustave Roussi.
Elle est basée sur l’observation précise du
comportement, rapportée par la famille, l’entourage, les différents
intervenants chargés des soins.
Elle permet le diagnostic positif de la
douleur.
Elle se compose de 2 parties distinctes. Les
informations de base et la grille d’évaluation elle-même.
• Les informations de base :
Comportent 10 questions correspondant aux
items de l’échelle.
Elle permet de décrire le comportement
habituel du sujet et sert de référence à la cotation des items, par un
intervenant ne connaissant pas le patient.
Elle doit faire partie du dossier médical des
patients hospitalisés.
• La grille :
Comprend 10 items, chacun côtés de 0 à 4, en
rapport avec le comportement habituel.
▪
Les signes d’appel correspondent
à la composante anxieuse de
▪ Les signes directs de la douleur, parfois
difficiles à identifier du fait des troubles moteurs.
▪ Les manifestations psychiques et motrices, vont dans le sens de
la régression et peuvent être confondus avec des signes dépressifs, parfois
difficiles à distinguer de l’agitation anxieuse.
Si un item est sans objet, il est côté 0.
Le score correspond à la somme des items sur
40.
De 0 à
2 : pas de douleur
De 2 à
6 : doute
Supérieur à 6 : douleur certaine.
Elle doit être traitée.
L’échelle ne peut être
remplie par un seul intervenant, mais en équipe avec la coopération de la
famille si possible.
Elle doit préciser le déroulement des actes de
la vie quotidienne (installation, toilette, repas,…)
Dans certains cas, ce n’est qu’après la
cotation de chaque item que la douleur est mise en évidence.
L’échelle permet d’adopter le même vocabulaire
pour des personnes n’ayant pas forcément la même perception de la douleur.
Le contexte émotionnel, les soins ne sont pas
les mêmes en institution qu’à domicile.
Cas clinique |
Jeune fille de 18 ans, quadraplégique
spastique avec troubles psychotiques associés.
Totalement dépendante pour les actes de la vie
quotidienne.
Se déplace en fauteuil roulant, qu’elle gère
de façon autonome.
Vit en institution et rentre au domicile le WE
et durant les vacances.
Communique avec un code oui-non.
Douleurs aigües lors d’une séance de
kinésithérapie, avec altération du comportement (agressivité +
automutilations).
Devant l’urgence repérée par l’équipe, elle
est hospitalisée.
A l’interrogatoire de la famille, on note une
luxation bilatérale de hanche.
Antécédents chirurgicaux :
1ère intervention à l’âge de 9 ans :
ténotomie des adducteurs, neurotomie de la branche antérieure du nerf
obturateur.
Post opératoire : douleur calmée avec
AINS et Palier 1
Aggravation avec exagération progressive de
l’excentration de la hanche gauche, et douleur chronique.
2ème intervention à l’âge de
13 ans : ténotomie large des adducteurs gauches.
Douleurs post opératoires difficiles à prendre
en charge, perte d’autonomie dans ses déplacements : antalgiques palier 2
+ AINS
Lors de son hospitalisation, la jeune fille
adopte une posture antalgique automatique et quasi permanente.
Il existe une appréhension majeure dès que
l’on s’approche.
Crie à l’effleurement, et tentative de morsure
à la moindre mobilisation.
Ne supporte pas le contact des draps, refuse
ses repas.
Plus de contact possible.
Le score de San Salvadour est porté à 32/40.
Elle reçoit en urgence des morphiniques.
Cela permet de calmer la douleur et autorise
l’examen radiologique qui met en évidence une calcification péri articulaire de
la hanche gauche, évoquant une péri-ostéo-arthropathie neurogène, certainement
survenue en post opératoire.
Traitement de retour à domicile : Paracétamol
+ codéine x 4 /jour + Rivotril 15 gtes/ jour.
Trois semaines plus tard, la jeune fille est
revue avec l’équipe soignante, sans les parents.
Les douleurs persistent au moment des
transferts, en posture assise dans son corset siège.
Elle a tendance à adopter une attitude
antalgique en flexion adduction de la hanche au bout de quelques minutes.
Supporte
bien le décubitus dorsal.
Nouveau score San Salvadour à 24/40.
A l’examen, on retrouve une abduction de la
hanche à 0°, alors que le corset siège lui impose une abduction à 20°.
La spasticité est majeure.
On propose alors de modifier le corset + une
dose progressive de Liorésal (antispastique) et de la revoir à un mois.
Lors de la nouvelle entrevue, sans les
parents, on constate :
L’installation dans le corset est à présent
plus confortable.
Les douleurs réapparaissent si l’installation
en posture assise est faite hors du corset.
Intolérance à la posture à quatre pattes avec
rire paradoxal.
Le score est évalué à 8/40.
L’équipe soignante rapporte que lors des WE en
famille, la jeune fille est plus agitée, la douleur augmentée.
Lors de son retour en institution le lundi, la
prise en charge se complique.
A l’interrogatoire de la famille, il apparaît
que l’observance du port du corset est remis en cause. Les parents refusent
l’appareillage.
Pas de modification du traitement
médicamenteux, mais un courrier est adressé aux parents, précisant la nécessité
et l’intérêt des postures et le rôle des médicaments.
Deux mois plus tard, la jeune fille est revue
avec l’équipe, sans les parents.
On note une nette amélioration générale dans
son comportement et la jeune fille retrouve ses codes de communication.
Quelques douleurs lors des transferts.
Plus d’agitation le WE.
Le traitement est maintenant observé et le
corset utilisé.
Le score est à 8/40. La codéine est stoppée.
Le paracétamol est maintenu avec le traitement
anti spastique.
On conseille également l’utilisation d’un lève
personne pour les transferts. Ceci afin d’éviter toute abduction de la hanche.
L’exemple est ici cité, afin de démontrer la
nécessité de maintenir l’échange entre les intervenants médicaux et
paramédicaux, mais également la communication avec les familles.
On constate trop souvent, des interprétations
à la recherche de la sémiologie de la douleur, ainsi que des pratiques au
quotidien très différentes.
CAS CONCRET |
PATIENTE ATTEINTE DE SCLEROSE EN PLAQUE AVEC
SYNDROME DEMENTIEL SEVERE
Définition
Il s’agit d’une atteinte du système nerveux
central, d’étiologie inconnue, même si des hypothèses inflammatoires,
infectieuses, toxiques, ont été soulevées.
Actuellement, la thèse d’une déficience immuno-allergique
est soulevée.
Il existe une prédisposition familiale, mais
non génétique.
Le processus démarre entre 20 et 40 ans, plus
rarement après 50 ans.
La maladie se manifestant par une
démyélinisation en plaque de la gaine qui entoure les fibres nerveuses, tout en
respectant la fibre elle-même.
Ces plaques siègent dans la substance blanche
de l’encéphale et de la moelle, où leur distribution est anarchique.
La maladie évolue par poussées successives,
sans calendrier fixe, trait essentiel de la maladie.
C’est à la fréquence des poussées, mais
surtout à la qualité des rémissions, que tient la gravité de la maladie.
Il semble que les poussées soient sensibles à
la corticothérapie et aux immunodépresseurs.
Par ailleurs, le traitement symptomatique est
essentiel, avec rééducation active et prise en charge psychologique familiale
et sociale.
Histoire de la maladie
Le diagnostic est posé, d’une probable maladie
inflammatoire, non spécifique du SNC, de type Sclérose en Plaques, en Septembre
1999.
Corticosensible, avec une phase d’accalmie de
plusieurs mois.
Nouvelle poussée en mai 2001, avec apparition
de troubles cognitifs et moteurs et une perte totale de l’autonomie.
Nécessitant une hospitalisation en long séjour médicalisé.
Puis nouvelle accalmie.
Janvier 2004, apparaît une nouvelle poussée
aggravant le tableau, avec sepsis à staphylocoque auréus et phlébite du membre
inférieur gauche, justifiant une hospitalisation.
Les hémocultures et une scintigraphie osseuse
(hanche et calcanéum droit) mettent en évidence, des foyers d’ostéite septique.
Pathologies associées :
● Epilepsies partielles (clonies gauches)
bien équilibrées sous neuroleptique.
● Signes cliniques
• Neurologique
met en évidence un syndrome
tétrapyramydal.
. Tétraparésie prédominant
aux membres supérieurs et inférieur gauche
. Une hypotonie axiale
. Une spasticité du membre
supérieur droit (biceps, grand pectoral, main droite et membre inférieur
droit).
. Un syndrome frontal
. Crasping de la main droite et
tremblement de repos du membre supérieur droit.
• Orthopédique révèle
.
Rachis
cervical souple
.
Flexum du coude droit à 50° avec
limitation de l’élévation de l’épaule droite à 75°
.
Limitation du coude gauche à 90°
.
Membres
inférieurs équins de 20° à G. et 5° à D.
.
Flexion
de
• ORL :
Troubles de la déglutition.
• Digestif :
Pose d’une sonde de
gastrostomie en juin 2005, reprise de l’alimentation en juillet 2005, avec
hydratation par sonde + géloditétique.
• Comportement :
Passivité, nécessité de stimulations afin
d’obtenir sa participation aux activités, qui reste faible.
• Etat trophique :
Pas d’escarre, ni de lésions.
• Pulmonaire :
Respiration normale.
• Rapport staturo-pondéral :
Normal
• Elimination :
Vessie neurologique,
empêchant une évacuation complète du contenu vésical. Porteuse d’une sonde à
demeure, changée toute les 3 semaines, afin de limiter la multiplication des
gestes invasifs, mais motivé par une BMR dont la patiente est porteuse.
Dès que les urines s’opacifient et dégagent
une odeur plus forte : augmentation de l’hydratation.
• Ni prothèse dentaire, ni lunettes
• Douleur :
Score DESS : 8/40
Abaissé à 2/40, prise en charge par
neuroleptique et myorelaxant.
● Bilan fonctionnel
• Dépendance totale pour les actes
de la vie quotidienne.
• Communication : compréhension
limitée aux ordres simples, capable de répondre par des mots oui, non, bonjour.
Cependant pas toujours adaptés.
Limitée par des troubles cognitifs
majeurs : mémoire, compréhension élaborée, attention, concentration.
● Traitement
• Anticoagulation : à titre préventif
• Neuroleptique : en raison de l’agitation (syndrome démentiel).
• Myorelaxant : permettent la détente musculaire et limiter la spasticité, source de
douleur.
• Protecteur gastrique : en couverture des traitements au long cours.
• Laxatif : à titre préventif, lié au neuroleptique et à l’immobilité. Pouvant être
stoppé sur simple observation des selles.
• Paracétamol : à la demande, fonction du score DESS.
●
Projet individuel
• Installation et appareillage :
Au lit et au fauteuil : mousse, corset siège adaptés depuis janvier
2005.
Atèle des 2 mains juin 2005.
• Kinésithérapie :
Mobilisation passive de l’hémicorps gauche et active de l’hémicorps
droit.
• Orthophonie :
Entretien des capacités d’expression et de compréhension.
• Educatif :
Atelier détente, musique, lecture, mais participation fluctuante.
Une sortie au cinéma, mais s’est endormie.
LE DIAGNOSTIC
INFIRMIER
Il va se baser sur
l’observation, mais aussi sur la connaissance de la personne handicapée et de
ses pathologies associées, sachant que cette patiente a des difficultés de
verbalisation et ne peut donc signaler un problème ou se faire comprendre
aisément.
D’où, la nécessité
d’un personnel connaissant « parfaitement » son patient et
particulièrement attentif.
Au cours d’un soin,
d’un échange, d’une activité, tout changement est à noter, que ce soit dans le
comportement ou dans l’état général de la personne.
Le diagnostic
infirmier est directement lié aux complications et aux risques que peut
engendrer le polyhandicap.
Il doit être le
reflet de la surveillance d’une thérapeutique (complications, effets
secondaires, incident ou accident liés au traitement).
Il doit être en lien
avec le ou les problèmes repérés, concernant la santé ou un risque potentiel,
pouvant engendrer des complications et porter atteinte à l’état de santé du
patient et/ou fausser la relation avec son entourage familial.
Les traitements et
prise en charge proposés |
Ils vont se centrer
sur la vie quotidienne, de la personne handicapée.
C’est à travers les
soins journaliers que s’établit spontanément la relation entre la personne
handicapée et le soignant.
Ces soins revêtent
une importance vitale.
L’alimentation :
Elle est au premier
plan. Ce doit être un moment de convivialité.
Il faudra veiller à
ce qu’elle soit adaptée. La composition, la texture, la présentation, à chaque
individu.
L’installation, le
degré de participation, les méthodes d’aide à l’ouverture de la bouche et à la
déglutition sont fondamentales.
Le sujet doit être
assis, la tête en rectitude par rapport au tronc, en stimulant une légère
flexion au moment de l’arrivée de la cuillère en favorisant l’approche
main-bouche.
La lèvre supérieure
doit rentrer en contact avec les liquides afin de stimuler la déglutition. Les
eaux gélifiées ont apporté un progrès considérable dans l’hydratation de ces
sujets. En effet l’apport de
Le matériel doit
être adapté pour maintenir l’autonomie (cuillère, tapis antidérapant…)
Le recours à une
sonde d’alimentation nasogastrique de gastrostomie s’avère parfois nécessaire,
soit pour la totalité de l’alimentation, soit en complément.
Ce mode
d’alimentation ne doit pas exclure pour autant, le sujet du groupe, et
maintenir les tentatives d’apport buccal ne serait-ce que pour le plaisir de
goût, ou conserver le reflexe de déglutition.
L’hygiène :
Les soins doivent
être quotidiens et revêtent leur importance.
Ils sont d’autant
d’occasion de moments d’intimité privilégiés, bien qu’ils puissent être
parfois, pénibles.
Bains, soins des cheveux,
prévention d’escarre…. autant de gestes où le soignant est engagé.
Les soins
bucco-dentaires, bien que compliqués doivent être effectués matin et soir avec
des brosses douces ou compresses à l’eau ou au dentifrice liquide.
L’habillage et le
chaussage doivent être confortables. (Vêtement respectant l’amplitude des
gestes et l’installation dans les coques ou corset, semelles ou chaussures
adaptées).
L’élimination :
Suivi quotidien des
selles et de l’élimination urinaire en quantité suffisante et normale.
La prévention, se
fera par une hydratation suffisante, une alimentation adaptée.
Le recours aux
laxatifs en cas de traitement favorisant la constipation doit être
automatiquement associée à la thérapeutique.
Les mobilisations et
levers quotidiens, les massages abdominaux, les verticalisations participent à
la régulation du transit.
Le sondage à demeure
reste un geste à éviter, aujourd’hui la tendance est à l’hétéro-sondage, ou
sondage itératif.
Les installations :
Elles ont un double
objectif :
- Mettre le sujet dans les positions bien
définies, afin de l’aider à appréhender au mieux le monde extérieur.
Prévenir les
déformations articulaires.
- Elles doivent veiller à son confort et à sa
sécurité. N’ayant que peu ou pas de notions du danger ou en tout cas, ne
sachant pas relier la cause à l’effet, ces personnes sont exposées
quotidiennement.
Les thérapeutiques :
Les traitements
médicamenteux sont précis, les écarts même minimes peuvent être source de
désordres, mais également fausser un diagnostic.
Ils sont à types de
myorelaxants, anti-spastiques, neuroleptiques, sédatifs, anti-inflammatoires,
protecteurs gastriques, anti-reflux…, auxquels viennent s’ajouter tous les
antalgiques des 3 paliers, ainsi que les traitements symptomatiques.
Les besoins relationnels :
Il s’agira de mettre
en place, tout un réseau de communication inter professionnels adapté au niveau
de compréhension de la patiente et à ses capacités relationnelles (troubles de
l’attention, fatigabilité, réponses
inadaptées)
A commencer par un code
d’accès au patient, afin de lui permettre de préserver sa vie sociale au
sein de l’institution, de s’adapter à la vie en collectivité et l’inclure dans
le déroulement de la vie en société.
Ainsi lui permettre
d’accepter le regard de l’autre et accueillir l’autre dans son espace de vie.
Prendre conscience
progressivement des limites de compréhension, de communication de leur enfant
ou parent, est une épreuve très douloureuse pour une famille, lorsqu’elle se
voit confrontée à la prise en charge d’une personne handicapée.
Les demandes
fréquentes, disproportionnées de thérapeutiques et de moyens éducatifs peuvent
masquer une dépression.
Il est impossible
d’échapper à l’espoir ou au découragement.
Les efforts et les
résultats obtenus semblent tellement dérisoires en rapport aux attentes, que
seule une aide soutenue de ces familles peut éviter une catastrophe.
Il n’est pas aisé de
décoder les signaux au cours d’un dialogue.
Il est pourtant
nécessaire de maintenir ce dialogue dans chaque rencontre ou acceuil, sans
rester purement technique.
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DIMENSION
RELATIONNELLE DU SOIN INFIRMIER
Les
Réactions
Confrontés à ce type
de patients, les soignants réagissent de façons différentes.
Qu’ils aient fait le
choix de cette « spécialité », ou que le hasard les ait amenés sur le terrain (stage,
remplacement…) ; la crainte de la relation, l’appréhension du contact direct
(peur, réaction en miroir, phénomène de projection), existent.
La crainte également
de ne pas savoir, de faire mal, ou de mal faire.
L’incapacité de
lutter contre la répulsion, le mot est fort, mais il faut oser le dire, le
reconnaître.
Les convictions
personnelles, font que nous ne pouvons, ou refusons. Car la maladie n’est pas
aisée à côtoyer, certaines nous répugnent.
Le polyhandicap
n’est pas une maladie, c’est un état.
Reconnaître
cette » différence » pour mieux la prendre en charge
Etre en accord avec
ses convictions et accompagner la vie quelle qu’elle soit, n’est pas une
évidence pour certains soignants.
La relation, la
pédagogie, le maternage, parfois l’indifférence (à la pathologie), le jeu, la
curiosité, la complicité, font que d’autres souhaitent faire un bout de chemin
avec la personne handicapée.
La
dimension doit avant tout rester humaine.
Trop souvent méconnues,
sous-estimées, sauf de ceux, vivant
auprès des personnes handicapées.
Leurs possibilités d’expression et leurs émotions, leur contact avec l’environnement très ou trop souvent
préservé, l’acquisition d’autonomie peuvent se développer lorsqu’ils sont pris en charge par des
professionnels compétents et non basé sur leurs manques.
A l’inverse une prise en charge
inadaptée ou interrompue peut entraîner
une régression immédiate et
souvent irréversible.
Nous savons aujourd’hui que le polyhandicapé peut apprendre.
L’accès à l’éducation est un droit, dont doit pouvoir bénéficier toute personne
polyhandicapée (loi du 11 février 2005)
Toutes les personnes
polyhandicapées sont capables de s’exprimer. En général dans un langage qui leur est propre et que
l’entourage se doit de découvrir. Qu’il
soit verbal ou non, le point essentiel est de leur faire signifier le
oui et le non.
A partir de ce
point, avec des questions-réponses, elle peut exprimer son approbation, ou sa
désapprobation, ses craintes, ses désirs…
La
relation doit reposer sur la confiance.
La personne
polyhandicapée est avant tout une personne meurtrie, une personne qui souffre
dans son corps et dans sa tête.
Elle est très
souvent restée à un stade
infantile, donc craintif, elle ignore qui nous sommes, mais est capable
de comprendre, pour peu que nous
nous donnions la peine de lui expliquer, de la rassurer, sans s’immiscer dans son intimité familiale
(encore que cela peut s’avérer nécessaire) ou son jardin secret, ni se laisser
envahir par les demandes incessantes.
Simplement lui apporter ce qu’elle est en droit d’attendre de
nous. L’amitié, l’affection, la
présence.
Ainsi la
confiance établie, la relation peut exister.
LES
AUTRE INTERVENANTS
Educateurs
spécialisés, aide-médico-psychologiques, psychomotriciens, moniteurs
éducateurs, kinésithérapeutes, sont autant de soignants avec lesquels la
coopération sera nécessaire et fructifiante.
Les progrès moteurs
existent et il est essentiel de préserver pendant la croissance, le moindre
progrès, résultat ou possibilité motrice existante.
La stimulation
sensorielle, visuelle, auditive, n’ont pas pour objectif l’éducation, mais sont
là plutôt pour créer une communication.
Les activités de
groupe, musique, cuisine, jardinage, peinture…. ou les sorties en extérieur
sont à adapter à chacun, en fonction des goûts et des aptitudes.
L’important est que
chacun ait un projet individuel établi et modifiable en fonction de son
évolution et des observations. Le tout suivant les possibilités familiales ou
institutionnelles.
A côté des codes
imagés, des pictogrammes, des symboles, différents systèmes de désignation par
balayage d’images ou ordinateur et les systèmes de paroles utilisés pour les
I.M.C. peuvent trouver des applications chez les personnes handicapées à
condition que les soignants y soient formés.
Ces dernières années
sont apparues des méthodes faisant appel à des niveaux plus archaïques de
« communication basale ». Ces méthodes par le biais du toucher,
du mouvement conjoint, de la respiration, permettent d’entrer en contact avec
les sujets les plus régressés en leur faisant prendre conscience de leur corps,
de ses déplacements dans l’espace, de se qu’il peut en obtenir en bougeant.
Quel que
soit le handicap et le mode de communication proposé, il faut une attention et
une cohérence entre les intervenants.
Différentes
Modalités de Prise en Charge proposées aux Familles |
Depuis les
intervenants libéraux à domicile, sur prescription du médecin traitant, dans
les centres d’Action médico-sociale précoce, les services de soins à domicile,
les difficultés sont parfois telles que la vie quotidienne à la maison est
impossible.
Les structures
publiques existent. Ce sont les Maisons d’Accueil Spécialisé.
Mais le nombre de
demandes dépassent largement les possibilités de ces établissements ; qui
sont financés par la sécurité sociale.
Les foyers
d’hébergement sont à double tarification, forfaits soins pris en charge par la
sécurité sociale et l’hébergement est financé par le département.
La question du
vieillissement des personnes polyhandicapées est un grave problème pour les
équipes.
Un sujet handicapé
léger, travaillant en CAT et hébergé en foyer, peut perdre son autonomie en
vieillissant et se comporter comme une personne polyhandicapée.
Actuellement, il
n’existe pas de structure accueillant ces personnes.
Certains trouvent
place dans des établissements non médicalisés.
Se pose alors le
problème de difficulté ou d’absence de communication pour les équipes non
formées à ce type de prise en charge.
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